samedi 27 octobre 2007

La malédiction de Nishram - Episode 12

La lune venait tout juste de pointer au dessus de la colline et Norbert Dentrefer n’était pas encore rentré, Silvia sa femme n’avait pas l’habitude de s’inquiéter pour si peu mais au village voisin les rumeurs parlaient de gens qui auraient croisés des monstres dernièrement, bien sur la plupart des rumeurs n’étaient surement pas fondés, mais comme on disait il n’y avait pas de fumée sans feu.
Leur jeune fille jouait dans le jardin, elle courait en zig zag tenant à la main une poupée de chiffon abimée et la faisant voleter autour d’elle en riant. Silvia la regarda en souriant, ils n’étaient peut être pas riches, mais ils avaient une vie agréable tous les trois. Elle tapota son ventre rebondie, tous les quatre plutôt, en espérant qu’enfin celui ci serait un petit homme, afin de faire plaisir à son mari. Elle regarda encore une fois en direction du chemin et comme elle ne le voyait toujours pas arriver, elle décida d’aller finir de préparer le repas qui cuisait lentement dans la cheminée de la maison. Elle s’approcha de la table et se servit un verre avec l’eau que contenait la cruche en terre presque vide.

-Alizia ma chérie, veux tu venir ici s’il te plait ?
-Oui maman, qu’est ce qui se passe t’il ?
-Tiens veux tu bien aller chercher de l’eau au puits pour quand papa rentrera ?
-Je peux y aller avec Zoé ?
-Mais oui bien sur, emmène Zoé avec toi mais dépêche toi s’il te plait il va bientôt faire nuit noire et je n’aime pas te savoir dehors quand il est tard.
-Oui maman, promis maman ! Allez Zoé, prend le pot à eau et vient avec moi.


La petite fille fit semblant de faire prendre le pot à sa poupée de chiffon et sortit en courant. Le puits était éloigné de la maison, mais la lune qui était bien brillante lui laissait voir parfaitement le sol, elle se mit à marcher plus lentement à mesure qu’elle s’éloignait de la maison et qu’elle entendait des bruits étranges, les bruits que la nature faisait autour d’elle et qui ne la rassurait pas.


-Zoé il faut que tu fasses bien attention à ne pas faire tomber le pot à eau, et puis tu sais ce que dis papa, il faut faire attention si tu entends un grognement, ou un raclement, ça peut être un animal sauvage.


A mesure qu’elle avançait et qu’elle parlait à sa poupée, le son de sa voix se faisait de plus en plus étouffé, elle avait du mal à respirer, se sentant oppressée. Elle n’aurait su dire pourquoi, mais quelque chose n’allait pas. Elle s’arrêta, écoutant attentivement autour d’elle la nuit, elle se retourna et regarda en direction de la maison, les fenêtres et la porte laissaient échapper la lumière qui coulait comme un torrent d’or par toutes les ouvertures, des volutes de fumée épaisses s’échappaient de la cheminée, Alizia vit l’ombre de sa maman passer près d’une des fenêtres et se sentit tout de suite plus rassurée, elle se retourna à nouveau en direction du puits.


-Maman elle a fait un ragoût tu sais, parce que papa il aime beaucoup très fort le ragout.


Elle n’avait plus peur et ne se rendit pas compte que la nature autour d’elle était finalement bien silencieuse par rapport aux quelques minutes précédentes. A mesure qu’elle approchait du puits, le chemin devenait plus sombre, et elle trébuchait parfois sur des petits cailloux qu’elle ne voyait pas.


-Tu sais zoé, heureusement que je suis une grande fille maintenant parce que sinon j’aurais peur du noir et on ne pourrait pas remplir la cruche.


Enfin elle s’arrêta à côté du puits, elle fit tourner la manivelle qui grinça de colère qu’on la dérange à une heure si tardive comme un chat qu’on réveille de sa sieste. Le seau d’eau arriva enfin par dessus la murette, et la petite fille sur la pointe des pieds l’attrapa et le tira pour le poser sur celle ci. Elle y introduisit le pot et le remplit en faisant attention de ne pas mettre les mains dans l’eau. Sa maman n’aimait pas qu’elle laisse ses mains tremper dans l’eau car ensuite ses manches mettaient un temps fou à sécher.
Lorsqu’elle eu remplir la cruche, elle repoussa le seau qui redescendit dans le puits tandis que la manivelle couinait à mesure que la corde se déroulait de plus en plus rapidement.
Mais elle était déjà parti en direction de la maison et n’entendit pas le son mat que fit le seau en touchant quelque chose au fond du puits alors qu’il aurait du normalement plonger dans l’eau claire.


Le chemin du retour fut plus rapide, la petite rassurée par la lumière de la maison et les ombres qu’elle voyait bouger à l’intérieur, elle devinait que son papa et sa maman devaient être en train de l’attendre, alors elle demanda à Zoé d’avancer plus vite.


-Tu sais Zoé papa doit être revenu, il a surement emmené à maman des tas de choses qu’on mange pour que maman fasse des bons petits plats. Je vais lui dire que je l’aime fort et qu’il nous a manqué hein qu’est ce que tu dis ? Tu veux qu’on lui fasse un gros câlin ?


A mesure qu’elle avançait sautillant légèrement, le cœur remplit de joie, elle voyait de mieux en mieux les lumières de la maison, et elle sursauta lorsqu’elle eu l’impression qu’une étrange tête poilue comme celle d’un rat gigantesque venait de se pencher à la fenêtre de la maison reniflant l’air comme cherchant à trouver quelque chose.


-Zoé tu crois que papa a des invités ? Je n’ai jamais vu ce monsieur avant. Vient Zoé on doit faire attention comment on est habillées.


La petite fille posa la cruche par terre et commença à lisser sa robe de manière à être plus présentable, elle fit de même sur sa poupée, ne regardant pas ce qui se passait vers la maison.


Le gobelin ressorti la tête à la fenêtre, il renifla à nouveau espérant sentir l’odeur de l’humain manquant, mais le vent soufflait dans le mauvais sens, et il n’arrivait pas à sentir quoi que ce soit, il se retourna.


-Il n’y a pas d’autre humain ici, dit-il à un orque qui était assis à la table de la maison, les pieds croisés posés sur celle ci.
- Si il manque quelqu’un, regarde par là, tu vois ces petites pièces de tissus ? Elles appartiennent à l’un des leurs, si nous ne voulons pas être mis dehors à la première heure demain, crois moi nous devons tout nettoyer parfaitement.
-Je vais voir si Spurlz a eu plus de chance que nous alors.
-Oui mais dépêche toi, je détesterais devoir sortir mon arme moi même. Et envoie moi ton outre de vin s’il te plait.


Le gobelin lança son outre sur la table, elle y atterrit dans un bruit flasque le cuir la composant ondulant au gré du liquide contenu. Puis il sorti par la porte de devant tournant en direction du chemin à l’opposé de la petite fille.


-Voilà Zoé, tu as maintenant une robe bien propre, on va pouvoir aller voir maman et papa


Silencieusement de manière à faire une surprise à son papa et sa maman, la petite fille approcha de la maison, se pliant légèrement en deux pour passer sous la fenêtre de manière à ce que sa maman ne puisse pas la voir passer. Elle avait le sourire des enfants qui préparent une grande surprise amusante en faisant peur à leurs parents. Lorsqu’elle fut à l’angle de la porte, elle s’arrêta, respira silencieusement et pris son élan, puis tenant toujours fermement Zoé et la cruche elle fit un pas de côté prête à hurler coucou quand elle se figea sa bouche ouverte sur un cri silencieux et les traits démesurément coincés dans une attitude de surprise, d’incompréhension et d’horreur. Le corps de sa maman gisait par terre prêt de la table, un liquide poisseux et sombre répandu autour d’elle et semblant s’étendre lentement comme si il coulait de quelque part sous le corps de sa maman.


Elle ne vit pas l’orque sur la chaise les pieds sur la table et la chaise en équilibre sur ses deux pieds arrière tout comme il ne vit pas la petite fille trop occupé à boire en lentes succions le contenu de l’outre, faisant un bruit grossier à mesure que le liquide poivré et enivrant coulait dans sa gorge et le long de son menton maculant ses vêtements déjà bien sales.
La petite fille lâcha le pot à eau qui se brisa en morceaux dans un bruit mat en atteignant le sol rugueux de la petite maisonnette, le liquide épais et sombre semblable à celui qui se trouvait sous sa maman gicla de l’intérieur du pot et éclaboussa le sol ainsi que les meubles et que la robe de la petite fille. Lorsque l’orque entendit le pot, il sursauta et la chaise bascula en arrière, l’orque tentant par tous les moyens de se rattraper à la table et dans les mouvements erratiques de ses mains il pressa l’outre qui répandit du liquide sur lui et sur la table, des gouttelettes se répandant en ligne droite jusqu’à la petite fille.
Lorsqu’il heurta le sol, son crane frappa violement une pierre enterrée dans la terre battue composant l’intérieur de la petite maison.
Sans réfléchir la petite fille toujours en train de tenir sa poupée se retourna et couru dans le noir de la nuit en direction de la seule cachette qu’elle pouvait imaginer à son âge et que son papa lui avait interdit d’approcher ou d’utiliser, elle ne savait pas si sa maman allait se réveiller ou pas, mais elle savait que lorsque son papa serait de retour, il irait surement la chercher là bas, elle trébucha plusieurs fois les yeux baignant dans des larmes qui l’aveuglaient, essayant d’empêcher les sanglots qui montaient dans sa gorge de sortir et de trahir sa position à l’ignoble monstre qu’elle avait vu dans la cuisine.
Elle arriva près de sa cachette et essaya de faire le moins de bruit possible afin de préparer celle ci pour pouvoir se cacher le plus surement possible, lorsqu’elle pu enfin s’y installer, sa poupée lui échappa des doigts et tomba sur le sol, mais déjà elle se trouvait trop loin pour tenter de la ramasser et pleura en silence lorsqu’elle s’immobilisa enfouissant sa tête dans sa robe tachée du liquide foncé qui venait du pot à eau qui s’était brisé et du vin épicé de la bête.


Lorsque le gobelin revint dans la pièce il tenait à la main une poupée de chiffon, il vit l’orque au sol et paniqua, il sortit son glaive et se retourna rapidement pour visualiser tous les recoins de la pièce, mais à part le cadavre au sol il ne voyait pas qui avait pu faire tomber son supérieur aussi lourdement sur le sol. Il se rapprocha et vit que celui ci semblait respirer et qu’il ne devait être que sonné. Il lui tendit la main lorsque celui ci sembla faire un mouvement dans sa direction.


-Que s’est il passé ?
-Tu le vois bien imbécile, je suis tombé de cette chaise bêtement, j’ai eu peur en voyant la petite fille qui se trouvait sur le seuil de la maison.
-Quelle petite fille ? Ho regardez ce que j’ai trouvé dehors assez loin de la maison dans la direction des collines.
-Et bien je crois qu’elle a du avoir aussi peur que moi, en effet je reconnais la poupée qu’elle tenait à la main, en tout cas ça y ressemble, et tu n’as pas vu la fillette, ni aucune trace d’elle n’est ce pas ?
-Non rien du tout et Spurlz n’a rien vu non plus depuis qu’il est en poste.
-Parfait parfait, alors nous voici installé au moins pendant quelques jours le temps de vider les vivres de cette famille, je ne voudrais pas que la petite fille réussisse à survivre dans les collines et revienne avec des renforts pour nous déloger. Tu peux aller dire à Spurlz que nous montons le camp ici, il peut rapprocher nos montures et servir le repas, il semble que notre charmante hôtesse nous a concocté un délicieux repas auquel il faut faire honneur.


Elle ne sut pas combien de temps avait passé, mais elle entendit des cris et des bruits métalliques, ainsi que des voix humaines qui semblaient être en grand nombre. Elle regarda le ciel et vit qu’il faisait jour, elle avait du s’endormir d’épuisement, et trembla en repensant à ce qu’elle avait vu le soir précédent, elle pensa tout de suite que son papa avait du rentrer avec des gens qui devaient être en train de soigner sa maman et de chasser les monstres. Elle attendit que le vacarme des combats cesse et lorsqu’elle s’aperçut que les voix étaient toujours humaines elle su qu’elle pouvait appeler à l’aide, ce qu’elle fit aussitôt, sa robe poisseuse du liquide que contenait le seau dans lequel elle avait pris place le soir précédent lui collait à la peau, et elle était tellement épuisée qu’au début seul quelques bruits parvinrent à sortir de sa bouche, puis prenant de l’assurance et sachant qu’elle ne pouvait s’en sortir qu’avec de l’aide, elle se fit violence et commença à crier, le volume de sa voix montant en force et en violence à mesure que tout ce qu’elle avait emmagasiné en elle depuis le soir précédent cherchait à sortir pour exorciser l’horreur de la situation, son cri se transformant en un hurlement désespéré lorsqu’enfin elle réalisa que ce liquide qu’elle n’avait cessé de voir depuis son retour dans la maison n’était autre que du sang et qu’elle comprit que sa maman n’avait pas pu continuer à vivre en ayant perdu autant de ce précieux liquide, ses larmes se mêlant à sa voix dans un cri qui résonnait sur les murs en pierres du puits dans lequel elle avait trouvé refuge.


Un homme de la garde royale entendit tout d’abord un étrange petit cri puis il entendit le hurlement, pensant à une banshee ou un shaman ennemi, il s’approcha lentement et avec précautions de la margelle du puits, d’où semblait provenir les cris, il ne pouvait pas voir dans le fond qui s’y trouvait mais il sut lorsqu’il fut la tête au dessus de celui ci, que le cri ne semblait pas être du à un ennemi quelconque. Il commença à enrouler la corde du seau de manière à le faire remonter, les cris ne cessèrent que lorsque le seau fut quasiment sorti et il faillit lâcher la corde et laisser le seau retomber dans le puits lorsqu’il aperçut cette petite fille recroquevillée dans celui ci et couverte des pieds à la tête de sang.


-Angus, fait venir le mage de combat s’il te plait, j’ai ici une petite fille couverte de sang et en état de choc, je crois qu’elle a du voir des choses qu’elle n’aurait jamais du…
Regarde moi petite, je suis un gentil, je m’appelle Eldricht je suis garde du roi tu vois mon tabard avec le gryphon et le couronne ? Ce sont les armoiries royales, tu n’as plus rien à craindre, il faut que tu te calmes d’accord ?


Pour toute réponse la petite fille qui avait cessée de pousser des cris, sanglotait avec force, son dos vouté pendant qu’elle se tenait les genoux entre les bras était agité de soubresauts à chaque fois qu’elle pleurait.
Un homme plutôt mince et pas très grand s’approcha d’elle, il tenait à la main sa poupée qui n’avait jamais semblait aussi propre et belle que ce jour là, il lui tendit et alors qu’elle la touchait, des filaments d’or et d’argent sortirent de la poupée et elle se rendit compte que ses mains ainsi que sa robe avaient repris les couleurs de la propreté.


-Tu as une poupée qui connaît quelques tours de magie intéressant lui dit l’homme.


Puis il lui appliqua la main sur le front lentement et comme si on avait démêlé son esprit, elle se sentit apaisée, et calmée, se rappelant tout ce qui s’était passé, mais n’éprouvant plus ni la peur, ni la colère, ni l’horreur de la situation. L’homme posa son front contre le sien et ferma les yeux puis il la prit dans les bras et alla la poser à l’ombre d’un pommier, demandant à Eldricht de bien vouloir la surveiller.
Il retourna près du puits et comme il venait de voir le sang qui avait giclé du pot à eau il regarda le seau qui contenait encore du sang et se penchant par dessus la margelle, il fit quelques mouvements de ses mains en les joignant au dessus du trou, comme deux ailes d’un oiseau tentant de s’envoler, quelques secondes après quelque chose remonta du fond du puits, voyant avec horreur ce que c’était il dessina une lune étincelante du bout de son index gauche en psalmodiant quelque chose et tout ce qui l’entourait sembla plongé dans une nuit noire et profonde.
Il déposa le corps de l’homme sans vie à côté du puits et sortit du globe de ténèbres pour être visible.


-Eldricht, est ce que vous avez une seconde mon ami ?


Eldricht s’approcha et le mage lui parla quelques secondes à l’oreille, puis il repartit vers la petite fille qui lui avoua qu’elle avait une tante qui vivait dans un petit village assez proche de la maison. Il fut décidé qu’elle serait confiée à celle ci, puisque plus personne ne pouvait s’occuper d’elle ici.


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